Il est intéressant, dans une démarche de compréhension de soi, d'analyser et de prendre du recul sur les mots que nous employons. Le pouvoir des mots est grand et leur impact sur notre être est conséquent.
Il existe plusieurs expressions, mots ou tournures de phrases que nous utilisons au quotidien et qui possèdent leurs lots de sous-entendus ou du moins, des connotations implicites (et souvent suggestives).
Auteur : Marc
Publié le 01/06/2021
Temps de lecture :
5 minutes
Informations
Le verbe "essayer"
Ce mot est très courant et je l'entends dans beaucoup de bouches. Depuis tout petit, nous utilisons "essayer" dans différents contextes. Mais ce que nous oublions de préciser, c'est qu'en employant ce terme, nous nous suggérons une possibilité d’échec.
C'est comme si une part de nous ne souhaitait pas "réussir".
Quelques exemples pour illustrer :
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"Oui, j’essaierai d’être à l’heure !" Combien de fois es tu arrivé à l’heure lorsque tu as essayé d'y être ?
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"J’essaierai bien de me mettre au piano." Depuis tout ce temps, tu t'y es mis au piano ?
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"J'essaye d'arrêter de fumer, je n'y arrive pas !" Je pense que pour la cigarette (ou toute autre addiction), nous connaissons déjà la réponse.
Ce qui m'intéresse dans ces exemples est de s'interroger sur la part de nous-même qui souhaite échouer dans la tentative.
Si nous souhaitons arriver à l’heure à ce rendez-vous, faire du piano ou arrêter de fumer, il se peut qu'une part de nous-même voit les choses différemment.
Quelle est la part de moi qui n'a pas envie de réaliser complètement l'action et pourquoi ?
J'apprécie davantage le "pourquoi", car il vient souvent montrer une raison inconsciente à l’échec. Alors je reformule la question et me dis :
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Pourquoi je souhaite échouer ?
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Qu'est ce que cela m'apporte d'échouer ?
Et c'est ici que commence tout le travail d'analyse et de compréhension.
Exemple personnel de la guitare
Un autre exemple pour illustrer la problématique sous-jacente et la légitimité du “pourquoi” :
L’instrument de musique que j’ai toujours souhaité jouer est la guitare. Je me souviens très bien m’être dit à mes 15 ans "Oh oui, j'essaierai bien d’apprendre la guitare". Et 15 ans plus tard, ce n'était toujours pas le cas. Alors avec du recul, je me suis demandé pourquoi.
Pendant de longues années, apprendre la guitare et savoir en jouer étaient des lubies, des envies que je souhaitais réaliser mais sans la volonté de produire l’effort nécessaire pour atteindre mon objectif. Apprendre la guitare (ou tout autre instrument de musique) requiert de la motivation, du temps, de l’énergie et de la volonté. Les premières notes sont difficiles, font mal aux doigts, ne sonnent pas juste : autant d’obstacles qu’il est difficile de surmonter.
L’une des raisons qui m’a poussé à acheter une guitare et à croire que je voulais en jouer était de me rapprocher de mon père. Partager plus de temps avec lui et créer d’autres connexions que celles que nous avions déjà étaient mes objectifs réels.
En comprenant ces objectifs, j’ai pris conscience que je n’avais ni la motivation ni l'énergie à consacrer à cette nouvelle discipline. Ce n’était pas la guitare qui m'intéressait vraiment, mais de passer du temps avec mon père. J’ai accepté l’idée que ce n’était pas le moment d’apprendre à jouer de cet instrument.
Depuis, je n’ai jamais redit "J'essaierai bien la guitare". J’ai accepté qu'à ce moment-là, ce n'était pas ma réelle envie, que je ne souhaitais pas me donner les moyens (pas pour les bonnes raisons du moins).
Quelques années plus tard, j'ai commencé la pratique de la guitare plus régulièrement. Et même si le travail est long et fastidieux, je progresse chaque jour, et surtout j'y prends du plaisir. Je me souviens de ce 17 mars 2018. J'ai pris la guitare dans les bras, et j'ai dit "Je veux apprendre à jouer de la guitare". Mon discours avait changé. Je ne souhaitais plus essayer, mais réussir.
Ce qui a changé dans le fond n'est pas mon discours mais la réelle envie que j'avais de vouloir apprendre et je me suis donné les moyens de réussir.
Mon discours avait changé parce que ma motivation avait changé.
Exemple des addictions
Mon dernier exemple est très connu des fumeurs et existe aussi pour toutes sortes d'addictions. L'arrêt d’une addiction nécessite une forte volonté, une envie et des moyens. Si c’était si facile d’arrêter, cela ne porterait pas le nom "d'addiction". Alors à chaque fois que je me dis que j'essayerai bien d'arrêter de fumer, je sais d'ores et déjà que je ne suis pas encore prêt.
Une partie de moi le souhaite très fort : "ah oui… si seulement je pouvais me débarrasser de cette addiction". Si je continue d'entretenir ma dépendance, c'est qu'elle m’apporte quelque chose auquel je ne souhaite pas renoncer.
Alors, au lieu de me sentir coupable, j'accepte l'idée que ce moment n'est pas encore le bon et que viendra le moment opportun plus tard.
Il n’est pas question de jugement, ni de bien ou de mal. Ce qui est intéressant, c’est de prendre du recul sur nos propres mots et de comprendre pourquoi notre inconscient a choisi ce terme là.
Soyons indulgent avec nous-même et faisons de notre mieux.
Il est parfois difficile de se rendre compte de la portée des mots que nous utilisons. Si l’occasion se présente, demandons à une personne de notre entourage de nous aider et de nous accompagner dans cette démarche. Demandons-lui de nous signaler à chaque fois que nous utilisons le mot "essayer". Faire le travail à deux, voire à plusieurs est plus efficace.
Dernier point : cet outil, comme chaque outil présenté, n'a pas la prétention ni d'être magique ni d'être efficace à tous les coups. Parfois, l'utilisation de ce mot ne sous-entend rien.
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L'utilisation du mot "essayer" peut suggérer l'échec de l'action souhaitée
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S'interroger sur les raisons sous-jacentes, analyser le "pourquoi" de la mise en échec
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Accepter la ou les raisons et être indulgent envers soi-même.
Ce que je te propose de retenir
La négation "ne pas"
Au quotidien, nous utilisons la formule "ne pas" pour exprimer une partie de nos envies, ou plutôt, ce que nous ne voulons pas. Ce que nous ignorons, c'est que le cerveau (l'inconscient précisément) peut faire abstraction de la négation.
L'inconscient prend en compte l'action, c'est-à-dire le mot qui est entouré de la négation.
L'utilisation de la négation peut donc avoir l'effet inverse de celui escompté. Voici un exemple que tu connais peut-être : un adulte donne un ordre à un enfant : "Ne cours pas !".
L'enfant continue de courir et le parent pense qu’il n'écoute rien. Pourtant, l'enfant a très bien entendu. En revanche, son inconscient a filtré le message et a pris en compte uniquement l'action "courir". La négation a été ignorée.
Si je te dis "Surtout ne pense pas à un marteau rouge !". Quelle est la première chose à laquelle tu penses ?
Lorsque nous souhaitons nous exprimer, il est intéressant de réfléchir à notre pensée et de la formuler à l'affirmative. En communiquant de cette manière, le message sera plus précis et mieux compris par notre inconscient.
Si nous souhaitons que l'enfant arrête de courir, ou d'aller moins vite, alors exprimons le d'une manière plus appropriée. Dans "arrête de courir", il y a l'action de "courir". Le cerveau prend en compte des mots clés, des actions, il entend "courir". La réaction est instinctive, il réagit aux premiers éléments qu'il comprend.
Nous pouvons transformer une phrase négative en une phrase affirmative.
"Ne cours pas" pourrait devenir "Ralentis" ou "Marche lentement".
Prenons un instant pour découvrir quelques exemples et les transformer :
N'aie pas peur
Ne te retourne pas
Ne crie pas
Ne tombe pas
Ne sois pas en retard
Reste calme
Regarde moi bien dans les yeux
Parle doucement
Regarde où tu vas, où tu mets les pieds
Sois à l'heure
Exemples à transformer
Et il existe aussi toutes les petites phrases du quotidien qui sont par définition courantes dans nos bouches, et qui sont aussi l'expression d'une négation.
C'est pas mal
Je ne dois pas oublier
C'est bien
Je dois penser à
Expressions du quotidien
Il peut être intéressant de se créer un réflexe, un ancrage lors de chaque utilisation d'une négation : l'analyser et se demander si la négation a réellement du sens, si la négation apporte quelque chose de concret à notre propos. Il ne faut pas bannir la négation de notre langage, loin de là. L'idée est d'être en accord avec ce que nous souhaitons exprimer, et d'en avoir conscience.
En pratiquant un peu chaque jour, nous pouvons devenir de plus en plus conscient du pouvoir des mots, de leurs impacts et leurs implications.
Introspection :
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